La vidéo tournée d’un immeuble en hauteur plonge sur une cour de récréation du 19e arrondissement d’où monte un grand cri scandé : « Macron démission ! Macron démission ! ». Ce pouvoir est devenu l’objet du lazzi des enfants. Normalement un régime qui en est là ne connaît plus qu’une forme ou une autre de sursis.
On ne spéculera pas plus que ça sur le sens politique des petits. Davantage sur le degré auquel le pays est imprégné de la détestation du monarque pour que les mioches en aient capté quelque chose. En tout cas, les petites éponges de cour de récré ne se trompent pas : il est haï. Et pour des raisons écrasantes, incontestables, dont la gravité ne cesse d’ailleurs de croître. Dans la série graduée des actes par lesquels un souverain en vient à perdre sa légitimité, le point maximal est atteint quand il prend le parti de constituer sa population en ennemie, et par conséquent de lui faire la guerre. Nous en sommes là, littéralement. Déployer des blindés en ville, équiper les forces de police de fusils à pompe, et même de fusils d’assaut, infliger aux manifestants des blessures… de guerre, c’est bien être en guerre. Du reste, s’il en est à prévoir des plans d’exfiltration des ministres et à prépositionner un hélicoptère pour évacuer l’occupant de l’Élysée, c’est que ce régime lui-même ne s’illusionne pas tout à fait quant à la réalité de ses rapports avec « sa » population.
Conclusion :
À l’époque, déjà, Christophe Barbier ne voyait pas ce qu’on pouvait opposer à la légitimité de Louis XVI puisqu’il avait été installé selon les procédures régulières de la succession dynastique — parfaitement légitimes, ainsi, par conséquent, que le produit de leur opération. Ce que ces gens sont à l’évidence incapables de voir, c’est que la légitimité n’est pas une qualité substantielle. Un temps les institutions sont dites légitimes. Et puis un jour on les regarde sous un autre angle, et on se dit qu’en fait elles ne le sont pas. Alors elles tombent, et toujours de la même manière : sous le poids du scandale.
Il s’en suit, pour les personnages de l’époque, qu’ils viennent prendre une certaine place dans l’Histoire — leur place. Celles de Castaner et de Macron sont en train de s’aménager. Macron va rester dans l’Histoire, c’est désormais acquis. Comme Macron-l’éborgneur, ou Macron-la-grenade. Peut-être Macron-l’hélicoptère. Ce serait souhaitable. Car maintenant, il faut qu’il parte.